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La Working Girl

Pourquoi j’ai décidé de faire de ma passion mon métier

En plus d’être une grande lectrice, je travaille depuis plus de trois ans maintenant dans l’édition. J’ai travaillé pour plusieurs maisons de littérature générale à différents postes, quasiment exclusivement tournés vers la communication. Mais à quel moment ai-je fait le choix de faire de ma passion pour la lecture une ambition professionnelle ? Quand ma passion est-elle devenue mon métier ?

Quand je serai grande, je voudrais être…

J’ai mis assez longtemps avant de savoir exactement vers quel genre de métier je voulais me tourner. J’ai néanmoins toujours été assez sûre d’une chose : je voulais travailler autour des métiers de l’écrit, ou des langues. Je vous en parlais d’ailleurs dans un précédent article : j’ai appris à lire très tôt et j’ai toujours été une grande lectrice. C’est aussi tout naturellement que j’ai développé un grand intérêt pour les langues étrangères : j’ai adoré apprendre l’anglais et l’allemand et pouvoir m’imprégner d’autres cultures !

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Quand est venue l’heure des premiers choix d’orientation, ce fut donc assez simple : je voulais absolument faire des études littéraires. Après un bac L, je me suis tournée vers une classe prépa parisienne, puis vers une licence d’anglais. Je m’y suis assez épanouie, du moins assez pour croire que je serais une très bonne prof. Mais c’est aussi à cette époque que j’ai commencé à tenir mon blog, et l’idée d’intégrer le milieu réputé si fermé de l’édition a commencé à germer dans mon esprit.

L’année du choix

Parce que je suis une grande angoissée des choix – mais que je regrette néanmoins rarement les grandes décisions que je prends, j’ai décidé de faire une césure pour tâter le terrain. Je suis donc partie un an en Angleterre en tant qu’assistante de français dans une école anglaise, afin d’assouvir mon désir de découvrir la culture locale de près, mais surtout de voir si le métier pourrait me plaire. Avant cela, j’ai décidé de faire un premier stage dans l’édition pour savoir si l’idée que je m’en faisais correspondait à la réalité.

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Spoiler alert : j’ai adoré mon année en Angleterre et je rêverais encore d’y vivre, mais j’ai donc clairement renoncé à rejoindre l’Éducation Nationale… À l’inverse, mon premier stage dans l’édition m’a convaincue que j’étais sur la bonne voie.

Chose amusante : je pensais comme tous les gens qui connaissent peu le milieu que je voudrais absolument être éditrice… quand j’ai intégré le service communication d’une petite maison d’édition de littérature générale. Je ne savais absolument pas ce qu’on y faisait. J’ai découvert les postes d’attaché.e de presse, de chargé.e de marketing, et ça m’a beaucoup plu.

J’ai donc rejoint un master spécialisé dans les métiers du livre en alternance, et eu d’autres expériences professionnelles qui m’ont confortée dans l’idée que j’étais à ma place. Après deux ans d’alternance, je suis aujourd’hui en CDI depuis un peu plus d’un an.

 

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Un métier-passion tous les jours ?

Est-ce que j’exerce un métier-passion ? Pas tout à fait, et c’était volontaire. Si lire est une passion, je n’ai jamais voulu en faire mon vrai métier en devenant éditrice, pour ne pas m’en dégoûter. Mais au fond, je parle et essaie de mettre en valeur des livres pour qu’ils trouvent leurs lecteurs et j’ai surtout la chance de travailler pour le milieu qui m’a fait fantasmer.

Actuellement, je suis chargée de relations libraires pour une maison de littérature générale. J’aurais sûrement l’occasion d’y consacrer un article entier, mais pour faire simple : mon travail consiste à convaincre les libraires de lire nos livres (pour mieux les vendre, pardi !) ou de leur envoyer des informations sur notre production. Je m’occupe aussi de la relation commerciale avec notre diffuseur, et aussi de tout l’aspect événementiel : celle qui envoie les auteurs un peu partout en France en librairie et festivals, leur réserve leurs billets de train et chambres d’hôtel, c’est moi !

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Évidemment, on ne va pas se le cacher : même le métier qui touche le plus à votre passion n’en sera pas passionnant tous les jours pour autant. Dire que je m’éclate devant des fichiers Excel ou quand un auteur m’annonce pour la douzième fois qu’il veut changer son horaire de train serait mentir.

Confucius disait : “Choisis un travail que tu aimes, et tu n’auras pas à travailler un seul jour dans ta vie“. Soyons honnêtes deux minutes : même si j’adore mon travail, quand mon réveil sonne le matin, cela ne m’empêche de rêver d’être plus souvent en vacances. Mais j’ai conscience d’avoir la chance d’avoir un travail qui peut être épanouissant, qui peut encore me mettre des étoiles dans les yeux. Quand un livre que j’ai foncièrement aimé rencontre son public, quand j’accompagne un auteur que j’ai toujours apprécié, j’ai conscience d’être chanceuse et de vivre quelque chose d’un peu exceptionnel.

Le revers de la médaille

Néanmoins, faire un métier dit “de passion” a un prix, et dans l’édition il se paie cher. Ou pour être très exact : il se paie mal. Cela n’a rien de secret, travailler dans la culture, c’est aussi accepter de travailler en ayant fait beaucoup d’études pour un salaire souvent peu valorisant. C’est aussi parfois accepter d’y consacrer ses soirées, voire ses week-ends dans certains cas (pro bono, donc), parce que c’est un métier-passion.

Je reçois beaucoup de messages de la part de jeunes qui souhaiteraient rentrer dans l’édition. D’autres souhaiteraient se reconvertir, devenir libraires. C’est à chaque fois la réponse que je leur donne : ce sont de très beaux métiers. Mais il faut aussi accepter de s’engager beaucoup, pour recevoir un salaire qui n’est pas toujours à la hauteur.

Quoi qu’il en soit, en ce qui me concerne, si je ne suis pas sûre de rester à mon poste pour de nombreuses années encore, je suis tout de même heureuse d’avoir fait le choix de me battre pour intégrer le milieu qui me faisait rêver. J’en connais aujourd’hui tous les avantages et les défauts – et si je devais le quitter… je n’aurais aucun regret à avoir !

 

Avez-vous la chance de faire le métier de vos rêves ?

Si vous pouviez faire de votre passion votre métier, lequel serait-ce ?

25 Comments

  • Delphine-Olympe

    Ah les métiers passion… On entend souvent “passion” en oubliant qu’il s’agit d’abord de métier. Ceux de l’édition ont leurs bons côtés, bien sûr, mais ils n’échappent pas aux mêmes turpitudes que les autres… Et la concentration des grands groupes n’arrange rien… Mais bon, aujourd’hui, après… un peu plus d’années que toi, je peux quand même dire que j’aime le mien (ce qui n’a pas toujours été le cas)

    • Laroussebouquine

      Chaque boulot a ses inconvénients, il serait effectivement naïf de penser le contraire ! Tant qu’on a encore envie de se lever le matin pour aller bosser et faire quelque chose qu’on aime, c’est l’essentiel 😉

  • Dorcas

    Un article très intéressant tout comme ton métier.
    Pour ma part, je suis secrétaire pas dans l’univers que je souhaitais de base mais je suis très contente.
    J’ai pensé à devenir libraire mais en Belgique c’est un secteur très bouché.
    Je ne regrette pas le secteur dans lequel j’exerce car il me correspond

    • Laroussebouquine

      Aaah le cafard du dimanche soir… Je vois très bien ! C’est vrai que de se lever le matin pour faire quelque chose qui nous motive vraiment, ça donne tellement plus de sens à tout le reste !

  • Fanny

    Article très intéressant !
    Tu n’enjolives pas la réalité et es assez claire avec ce que tu penses de ce métier.

    Clairement je ne fais pas le métier que je voulais ( j’avais commencé l’unif en langue et littérature française et romane, je me voyais éditrice… Et j’ai foiré donc reconversion pour des études de prof…) je n’ai pas aimé mes études, je n’ai pas aimé les stages que j’ai fait dans le secondaire ( Belgique), et puis j’ai donné cours à des adultes et là, révélation ! C’était ça que je voulais faire. Maintenant j’aime ce que je fais, j’aime la relation avec mes apprenants adultes. Je regrette juste le côté apprentissage de la littérature ( ce n’est pas dans les programmes, je fais de la remise à niveau en français) mais je me dis que mon blog me permet de toucher des gens.

    En. voilà un long commentaire

    • Laroussebouquine

      Tant mieux si tu as pu avoir une révélation par la suite… Je suis convaincue qu’on peut parfois se découvrir une vocation ou au moins un intérêt très fort pour certaines professions qui ne nous auraient jamais attirées à la base !

  • Aria

    Je suis (j’étais ?) libraire et actuellement je suis en train de me poser la question de changer de voie professionnelle car comme tu le dis, allier travail et passion à des inconvénients. Souvent je le suis dégoûtée de la lecture parce que je lisais tout le temps, absolument tout le temps pour préparer des argumentaires sur un maximum de livres et donc avoir plus de facilité à les conseillers par la suite. Je me mets une pression énorme pour lire un maximum de livres différences pour sortir de ma zone de confort et avoir des choses à recommander à tous les types de clients, toutes les demandes possibles. Et quand le salaire est bas, eh bien au bout d’un moment la balance bénéfice/sacrifice devient trop déséquilibrée, la passion s’amenuise. Hors, en ce qui me concerne, je pense préférer opter pour un métier qui ne soit lier à ce point à la passion pour ne pas trop amocher celle-ci ^^

    • Laroussebouquine

      J’ai aussi longtemps pensé que je voudrais devenir libraire… mais passer la vie dans les cartons pour un salaire souvent minime m’a fait changer d’avis. Je trouve que c’est aussi un métier qui fait fantasmer mais on en oublie beaucoup d’aspects !
      Et pour être chargée de relations libraires et vous enquiquiner toute la journée pour que vous lisiez nos livres, j’imagine bien la pression que tu évoques… Bon courage pour ta possible reconversion !

  • Olivia

    Très intéressant ton article, je ne savais pas que tu voulais être prof de français aussi à un moment !
    C’est drôle, toi c’est un stage qui t’a convaincue de faire de l’édition ton métier, moi c’est en faisant des stages que justement je me suis dit que ça n’était peut-être pas pour moi…
    Et finalement, aujourd’hui je me retrouve à faire du freelance dans l’édition, (bientôt) en plus d’un job très mal payé dans le social parce que c’est ce qui a le plus de sens pour moi ! Comme quoi, la vie nous réserve d’étranges surprises…

    • Laroussebouquine

      Comme quoi les stages sont utiles… et qu’aujourd’hui c’est de plus en plus rare d’avoir un parcours tout tracé sans changement de cap au cours de sa vie pro !

  • Sandrine

    Et on peut savoir pour quelle maison tu travailles ou c’est secret défense ? Moi, je suis bibliothécaire depuis 8 ans. J’aime les livres depuis toujours mais ça ne m’était pas venu à l’esprit d’en faire mon métier. J’ai rêvé d’être journaliste. J’ai eu l’occasion de travailler dans ce milieu. Mais je ne voulais pas plaquer ma région pour aller à Paris… Je n’ai pas trouvé de place dans ce domaine à la sortie de l’école mais finalement, je ne regrette pas. Aujourd’hui, je fais des chroniques sur la radio locale, quelques piges par-ci, par-là et ça me suffit 🙂

    • Laroussebouquine

      Effectivement dans l’édition (et dans la presse) beaucoup de choses se font à Paris, c’est l’inconvénient…
      Et je ne donne pas le nom de mes employeurs pour éviter tout conflit d’intérêt 😉

  • bussiere

    Dans une autre vie, je serai violoncelliste soliste pour émouvoir des salles combles aux sonorités graves et humaines de cet  instrument majestueux .
    Dans une autre vie, je serai l’écrivain d’une seule œuvre, publiée dans le monde entier, éditée uniquement sur papier, dont la lecture rendra des millions de lecteurs insomniaques.
    Dans une autre vie, je serai médecin urgentiste, présent sur toutes les catastrophes naturelles pour en sauver des milliers d’autres, et justifier ainsi la mienne.
    Dans une autre vie, je construirai et assurerai la pérennité d’écoles primaires dans tous les villages d’Afrique pour donner un avenir aux enfants les plus démunis.
    Dans une autre vie, égocentriste assumé, je naviguerai en solitaire sur un voilier et, d’escale en escale, je rencontrerai le monde au rythme du vent.
    Dans une autre vie, dés atteint l’âge des premiers renoncements, je me hâterai de passer à la suivante… à moins qu’elle ne fût  la septième et dernière !
    Dans une autre vie…mais ne les aurais-je pas déjà toutes vécues ? Alors, mieux vaut penser à finir aussi bien  que possible celle d’aujourd’hui, déjà largement consommée, et dans laquelle sont mes amis.

  • Benoit

    Merci Solène! Merci pour ce témoignage, merci pour ta transparence.
    Je ne peux que partager ce que tu écris et abonder: oui exercer un métier passion est AVANT TOUT un choix humain (et non un choix financier).

    Il revient à répondre à la question suivante selon moi: comment puis-je être heureux ? Qu’est ce que réussir ma vie ?
    Gagner un max de blé sans prendre du plaisir ? Vivre de plaisir et dormir sur un matelas à même le sol ?
    Trouver un juste milieu ?

    J’estime qu’il faut avant toute chose penser à soi. Se faire plaisir tout en étant réaliste. Et cet article le démontre parfaitement.
    Tu n’y seras peut-être qu’un temps, tu feras peut-être la même chose dans 30 ans… Ce qui est certain c’est que tu as voulu ce que tu fais et tu as tout fait pour le faire (aie aie aie pas tres littéraire cette phrase ^^)

    J’en suis venu aux mêmes conclusions: allier passion et pro est certainement la meilleure chose pour mon bien-être. Et c’est ce qui me rendra heureux. Pas riche vis à vis du banquier mais richesse humaine sans commune mesure.

    un futur libraire 😉

    • Laroussebouquine

      Le mieux reste évidemment de trouver un équilibre – chose qui est loin d’être évidente ! Mais oui, je fais partie de ceux qui pensent qu’on passe beaucoup trop de temps au travail dans sa vie pour faire quelque chose qui ne nous plaît pas (du moins, quand on a le privilège de pouvoir faire ce choix).

      Bon courage à toi pour ton éventuelle reconversion, c’est très courageux de se lancer comme libraire encore aujourd’hui !

  • Annaëlle

    Un article si inspirant ! On voit souvent uniquement les avantages à faire de sa passion son métier mais on oublie souvent les difficultés et questionnements que cela peut poser. Tu en parles de manière très éclairante et inspirante. J’ai adoré te lire et de fait, te connaître un peu plus dans cet article.

    • Laroussebouquine

      J’ai quelques petites idées… mais en tout cas je pense que je resterais proche du milieu, cela me passionne encore trop pour me voir ailleurs !

  • Céline

    Blogueuse et demandeur d’emploi, j’étais comme un poisson dans l’eau lors de mes stages en médiathèques… Ne pas stresser pour aller travailler pour moi qui suis hypersensibilite, c’était super. Malheureusement après un dur combat pour pouvoir faire mon DU médiathécaire jeunesse, je n’ai que des refus et Pôle Emploi veut me faire des petits jobs (ménages, vente…). J’ai postulé pour être conseiller numérique, mais la aussi trop de candidats pour peu de postes.

    • Laroussebouquine

      J’ai aussi une amie qui avait fait le même parcours… effectivement en médiathèque les postes sont encore plus rares… bon courage !

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