rentrée littéraire d'hiver
La Lectrice

Trois belles découvertes de la rentrée littéraire d’hiver 2021

Chaque rentrée littéraire en chasse une autre, et depuis quelques semaines, les nouveautés de la rentrée littéraire d’hiver 2021 ont déjà envahi les librairies.

Sur les presque 500 livres qui vont tapisser les tables en ce début d’année, je n’en lirai évidemment encore que quelques-uns, une infime proportion. Mais j’ai déjà fait de très belles découvertes et j’ai forcément eu envie de vous les partager !

La semaine dernière, je vous parlais de mon premier coup de coeur de l’année pour un roman étranger, Le Train des enfants* de Viola Ardone. Aujourd’hui, je vous présente trois romans français qui m’ont tout autant fait chavirer !

Les Bordes ; Aurélie Jeannin*

L’an dernier, je découvrais Préférér l’hiver*, le premier roman d’Aurélie Jeannin. C’était d’ailleurs l’un des premiers romans de la collection Traversée, lancée en janvier 2020 chez Harper Collins. J’avais adoré l’écriture de l’auteure, même si le caractère très sombre et flou du roman m’avait un peu désarçonnée.

Cette année, Aurélie Jeannin signe Les Bordes, qui a été mon premier coup de coeur de 2021. Les Bordes, c’est un lieu, un hameau dans un endroit inconnu, le lieu où vivent les beaux-parents de Brune. Elle qui est juge d’instruction et s’occupe d’affaires qui remplissent les pages des faits-divers redoute toujours d’y retourner. Chaque année en juin, le temps d’un week-end, ils s’y retrouvent. Pour elle, qui n’arrive pas à gérer ses deux enfants, c’est toujours une épreuve, d’autant qu’elle n’est pas accueillie à bras ouverts.

Les Bordes est un roman sur la maternité comme on en lit peu. Un roman qui évoque l’amour plus fort que tout, la peur qui prend aux tripes, mais aussi tout le reste : les chamailleries et les cris qu’on ne peut plus entendre, la fatigue qui s’accumule et le fardeau tous les jours un peu plus lourd, celui de ne pas savoir tout gérer tout le temps. La charge mentale.

“Passé la grossesse, la naissance et les premiers mois d’éblouissement, sa conscience s’était aiguisée au fur et à mesure. Ils avaient mis au monde un être qu’ils ne pourraient pas protéger. Ils avaient fait naître en eux et entre eux une peur incommensurable que rien au monde ne pourrait jamais combler.”

Après Préférer l’hiver, Aurélie Jeannin signe un roman encore plus fort, sur un sujet très contemporain. Le temps d’un week-end, les secrets de famille pourraient remonter. Un drame vient d’avoir lieu, un autre est déjà là, en puissance.

Ce roman m’a fait l’effet d’une claque est est d’ores et déjà mon premier coup de cœur de l’année !

 

rentrée littéraire d'hiver

 

Le Mal-épris ; Bénédicte Soymier*

Vous connaissez peut-être Bénédicte Soymier grâce à son blog Au fil des livres, que je suis personnellement depuis plusieurs années. C’est donc avec grand plaisir que j’ai découvert son premier roman il y a quelques semaines, publié aux éditions Calmann-Lévy.

Pour son premier roman, Bénédicte Soymier s’est attaquée à un sujet également ultra contemporain : celui des violences conjugales.

Le Mal-épris ne raconte pas une histoire très originale. Un homme, qui a grandi avec un grand sentiment d’infériorité, et qui vit avec une frustration intense nourrie par le rejet des femmes, s’en prend à l’une des rares qui tombe dans ses filets. L’intérêt n’est finalement pas tant dans l’intrigue que dans la psychologie des personnages, d’une justesse incroyable.

Comment passe-t-on à l’acte ? Quel est l’élément déclencheur de la violence ? Ne commence-t-elle véritablement que par des coups, ou par des mots, des reproches presque anodins ? Pour Angélique, la relation avec Paul va vite virer au désastre, sans qu’elle ne sache réellement quoi faire.

A LIRE AUSSI : Trancher d’Amélie Cordonnier

Paul est laid. Tel l’Homme qui rit de Victor Hugo, sa vie ne se résume qu’à de la frustration et de grosses déceptions. Il porte un grand sentiment d’infériorité, renforcé par une enfance difficile. Paul voudrait être aimé, il est juste un peu maladroit. Humilié par sa rencontre fugace avec Mylène, il se jure que celle avec Angélique sera la bonne. Angélique est une mère célibataire qui porte bien son nom. Elle voudrait être aimée aussi, elle n’est pas exigeante. Après tout, elle a souvent été si déçue aussi…

Sans jamais tenter de les juger, Bénédicte rentre dans la psychologie de ses personnages pour expliquer – à défaut de justifier – l’inexplicable. Ou comment la frustration mène à la vengeance, de la façon la plus honteuse qui soit.

Si j’ai peiné à lire ce roman certains jours, c’est parce qu’il était finalement trop intense, trop vrai, trop violent. Si le sujet ne vous effraie pas, je ne peux néanmoins que vous conseiller ce roman particulièrement fort et juste sur un sujet que beaucoup de gens peinent encore à comprendre.

 

Danse avec la foudre ; Jérémy Bracone*

C’est avec un autre premier roman que je conclus aujourd’hui cet article : Danse avec la foudre de Jérémy Bracone m’a fait l’effet d’une claque. Lu d’une traite, en deux heures à peine, ce roman social m’a laissé exsangue, avec un sacré goût amer. Une nouvelle fois : âmes trop sensibles, s’abstenir !

Danse avec la foudre est un roman qu’on pourrait facilement camper dans la catégorie du “roman social”. Comme Zola le faisait en peignant la classe ouvrière de son époque dans Germinal, Jérémy Bracone raconte la vie d’une génération désenchantée. Dans un coin de Lorraine qu’il appelle la “Petite Italie”, en référence à tous les immigrés venus s’y installer il y a plusieurs générations, de nombreuses familles ont toujours travaillé pour les usines du coin. Les hommes se retrouvaient au bistrot et passaient leurs dimanches dans les jardins ouvriers, autant de vies simples et sans histoire, mais où chacun y trouvait son compte.

De tout ça, Figuette n’a connu que les restes : les piquets de grève qu’on érige encore, même si la lutte est de plus en plus compliquée, les plans sociaux à la pelle et les délocalisations faites dans la plus grande indifférence. Avec sa bande d’amis, ils attendent que leur sort soit scellé, avec plus ou moins de fatalisme.

Figuette vit avec sa fille, Zoé. Sa femme Moïra est partie du jour au lendemain, il y a quelques mois, sans laisser de trace. Avec beaucoup de nostalgie, il se remémore leur rencontre et leur histoire, presque désespérée. Moïra était un personnage de feu, aussi solaire que désaxée, et sa présence était le grain de folie qui manquait à Figuette. Mais le grain de folie s’est vite transformé en une tornade imprévisible, et Moïra est devenue aussi folle à lier qu’ingérable. Pour la contenir, Figuette a voulu faire de sa vie une fête, toujours plus lumineuse et étincelante. Aujourd’hui, accablé par les dettes et le chagrin, il s’est promis de faire la même chose pour sa fille.

Dans ce décor de zone pavillonnaire où le chômage est au plus haut, entre franche camaraderie et faillite industrielle, Jérémy Bracone signe un premier roman aussi poétique que déchaîné sur une histoire d’amour et de déraison.

Les livres suivis d’un astérisque m’ont été envoyés gracieusement par la maison d’édition.

4 Comments

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *