L'odeur de la colle en pot d'Adèle Bréau
La Lectrice

L’odeur de la colle en pot – Adèle Bréau

Il y a quelques mois déjà, je recevais un étrange colis régressif de la part des éditions JC Lattès : au programme, bracelet fluo qu’on claque sur le bras, sucre pétillant, et L’odeur de la colle en pot d’Adèle Bréau, accompagné de l’indémodable pot de colle Cléopâtre qui a toujours été impossible à étaler mais sent bon l’amande. Je me suis plongée dans ce roman sans trop d’attentes, et j’ai eu un véritable coup de cœur pour cette histoire !

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Septembre 1991. Caroline a treize ans et intègre son nouveau collège. Avec ses parents et sa sœur Charlotte, ils ont quitté la banlieue pour s’installer à Paris, dans un appartement trop grand où les liens se distendent chaque jour. S’il voulait se rapprocher de ce travail qui le dévore, le père est pourtant de plus en plus absent. Quand il est là, c’est vêtu de ce blouson qu’il ne quitte plus, et de cet air qui semble dire son désir de partir loin.
Autour de l’unique téléphone fixe de la maison se chuchotent les secrets d’une famille en plein chaos : le chagrin de la mère, la fuite du père et les tourments adolescents de l’héroïne, qui déroule le fil de cette année si particulière où l’enfance s’éloigne.
Caroline restitue le portrait d’une génération désenchantée, les professeurs, les premiers flirts, les cafés où l’on fume encore, les cabines téléphoniques, les vidéoclubs, la musique triste dans son walkman, les cahiers Clairefontaine, les Guignols de l’Info, le bruit des craies et c’est toute une époque qui resurgit comme lorsqu’on plonge son nez dans ces petits pots de colle à l’odeur d’amande.
Récit d’un temps révolu autant que de l’adolescence, L’Odeur de la colle en pot peint avec légèreté et mélancolie le moment de bascule entre l’enfance et l’âge adulte, une période bouleversante et intemporelle.

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L’odeur de la colle en pot d’Adèle Bréau est le roman d’une adolescence dans les années 90 à Paris. C’est l’époque des doudounes Chevignon, des cassettes VHS, d’Une Nounou d’enfer et des boys bands. Etant née en 1996, je n’ai pas complètement partagé ces références, même si j’ai eu le privilège de jouer à la Game Boy Color, d’écouter les Spice Girls et de piquer le baladeur CD de mon père.

Le roman des années 90…

Adèle Bréau signe ici le roman d’une époque pas si ancienne, mais qui convoque forcément chez le lecteur déjà des souvenirs lointains. Elle fait ressortir avec une légère nostalgie tous les symboles qui ont fait les années 90, des plus drôles aux plus cocasses – qui s’imaginerait encore devoir passer ses coups de fils agrippé à l’unique téléphone familial avec fil ?

C’est le roman d’une époque où les smartphones n’existaient pas encore, où on s’écrivait des cartes postales en vacances pour se donner des nouvelles, et où on fumait encore dans les bars.

Caroline, l’héroïne de l’histoire a treize ans, et pour elle, tout est compliqué. Déjà, tout a mal tourné depuis que ses parents ont décidé de quitter la banlieue pour venir s’installer dans Paris dans un appartement plus petit. Depuis, son père ne met quasiment plus les pieds à la maison et sa mère ne fait que pleurer à longueur de journée. C’est sans compter sur sa petite sœur qui la met sur les nerfs, et son nouveau collège, où elle se sent complètement transparente. Etre adolescente, parfois, c’est vraiment trop difficile à gérer !

… Mais aussi complètement intergénérationnel !

Qui n’a pas déjà eu droit aux engueulades des parents sur l’autoroute, qu’on tente de ne pas trop écouter, engoncé à l’arrière avec trop de bagages ? Qui n’a pas connu les joies des premières classes vertes ou classes de neige, où on garde le même pull toute la semaine et on rentre crevé, mais dont on ne garde que de bons souvenirs ?

L’odeur de la colle en pot d’Adèle Bréau ravive en nous de forts souvenirs d’adolescence, où tous les choix les plus insignifiants semblent cruciaux, et où la perspective du premier patin semble à la fois lointaine et résolument trop effrayante. Avec beaucoup d’humour, elle détaille ces fausses postures que l’on pouvait prendre à treize ans, avec l’espoir d’attirer les regards et de ne surtout pas être la risée du collège. Elle raconte aussi les problèmes de famille, auxquels on fait mine d’être insensible, et qui pourtant ont fragilisé les jeunes à peine sortis de l’enfance que l’on a pu être.

C’est le roman des copains, des parents qui s’engueulent, des conversations que l’on a pendant des heures au téléphone alors qu’on a rien à se dire, et des jouets à peine remisés au placard qu’on aimerait pourtant parfois bien ressortir. Adèle Bréau propose un roman drôle et d’une touchante justesse, qui parlera aux plus grands comme aux plus jeunes, en réussissant le pari fou de faire d’un roman sur une époque révolue un roman plus que jamais intemporel. Un roman coup de cœur !

L'odeur de la colle en pot d'Adèle Bréau

L’odeur de la colle en pot ; Adèle Bréau

Editions JC Lattès

Paru le 24 avril 2019

280 pages

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