La Lectrice

L’Albatros – Nicolas Houguet

L’Albatros de Nicolas Houguet est un roman que j’avais envie de lire parce que je connaissais l’auteur. J’avais su il y a déjà de nombreux mois qu’il publiait un livre aux éditions Stock, et j’étais particulièrement curieuse à l’idée de le découvrir. Cette découverte s’est révélée être un véritable coup de foudre.

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Mardi 20 octobre 2015. À l’Olympia, la foule se presse pour aller écouter Patti Smith. Nicolas emprunte une coursive, fait rouler son fauteuil jusqu’à l’ascenseur et s’installe au milieu des gradins, au-dessus de la table de mixage – « absurdement placé, comme toujours ». C’est la première fois qu’il se rend seul à un concert. Dans la fosse, invisible, se trouve celle qu’il a aimée et qui est partie.
Soudain, Patti Smith entre en scène. Elle a soixante-huit ans, la puissance des sorcières, le regard sauvage. Gloria ! Sa voix est un ciel dans lequel Nicolas s’élance les yeux fermés. Il y retrouve l’enfance, les peines et les joies, les chers disparus, les histoires d’amour, les rêves d’un corps empêché. Il y retrouve tous les poètes, les chanteurs et les écrivains qui lui ont donné une place dans le monde. Il s’y retrouve lui.
Autobiographie musicale, poétique et anticonformiste, L’Albatros est un hymne à la liberté insufflée par une Pythie des temps modernes.

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Il y a quelques semaines, j’ouvrais les épreuves de L’Albatros, un brin tremblante. J’étais terriblement excitée à l’idée de découvrir le roman de celui qui met tant de poésie dans ses chroniques. En quelques minutes à peine, voilà que j’étais complètement retournée, les nerfs en pelote. Certains auteurs parviennent à vous émouvoir dès les premières lignes. J’ai malheureusement dû interrompre ma lecture pour des raisons un peu idiotes, et j’ai finalement attendu des semaines pour m’y remettre, avec l’ouvrage définitif dans les mains cette fois-ci.

J’ai été secouée par un narrateur qui dit la difficulté d’être tout le temps un peu à côté. J’ai vu au-delà de l’auteur qui ne supporte plus qu’on dise de lui qu’il est “cloué dans un fauteuil”, et qui pourtant n’a droit qu’aux places réservées, souvent pas les meilleures, même en concert.

“On garde toujours en soi, longtemps, le souvenir de ces gens qu’on aime et à qui on rêverait de ressembler. Cette aisance et ce charme.”

J’ai été touchée par une histoire d’amour éphémère et pourtant si intense, où même les mots ne sont plus nécessaires tant les sentiments écrasent tout le reste. J’ai été émue par la parole d’un homme à la fois drôle et mélancolique, dont la vie se résume à beaucoup de courage mais aussi pas mal de rendez-vous manqués.

“J’aimerais pouvoir aimer sans ressentir l’envie d’écrire. En oubliant les mots, on peut réellement vivre. L’écriture raconte une fuite et comble une absence. C’est nécessairement malheureux. Parce que la nuit appartient à ceux qui s’aiment. Pas à ceux qui se l’écrivent.”

Il y a des textes qui vous touchent dans leur plus simple appareil. Leurs auteurs se mettent à nu pour vous, et si certains tombent alors dans le nombrilisme, ce n’est en rien le cas ici. Le temps d’un concert de Patti Smith, Nicolas Houguet revient avec pudeur sur de nombreux instants qui ont marqué sa vie. C’est délicat, tendre et mélancolique à la fois.

L’Albatros de Nicolas Houguet, c’est le récit d’un envol majestueux par un homme simple et amoureux. Pour les amoureux de Patti Smith, mais pas que, parce que toutes les plus belles histoires d’amour (même contrariées) ont quelque chose d’universel.

L'Albatros de Nicolas Houguet

L’Albatros ; Nicolas Houguet

Editions Stock

Paru le 13 mars 2019

230 pages

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