Corniche Kennedy – Maylis de Kerangal
Titre : Corniche Kennedy
Auteur : Maylis de Kerangal
Editions : Verticales
Date de parution : 2008
Nombre de pages : 178
Quatrième de couverture : “Les petits cons de la corniche. La bande. On ne sait les nommer autrement. Leur corps est incisif, leur âge dilaté entre treize et dix-sept, et c’est un seul et même âge, celui de la conquête : on détourne la joue du baiser maternel, on crache dans la soupe, on déserte la maison.”
Le temps d’un été, quelques adolescents désœuvrés défient les lois de la gravitation en plongeant le long de la corniche Kennedy. Derrière ses jumelles, un commissaire, chargé de la surveillance de cette zone du littoral, les observe. Entre tolérance zéro et goût de l’interdit, les choses vont s’envenimer… Âpre et sensuelle, la magie de ce roman ne tient qu’à un fil, le fil d’une écriture sans temps morts, cristallisant tous les vertiges.
Mon avis : Après avoir terminé Réparer les Vivants et eu besoin de quelques jours pour m’en remettre tant ce livre m’avait mis une claque, j’ai eu très envie de découvrir l’auteur avec d’autres livres. Comme d’habitude, je n’ai pas résisté à l’appel de la bibliothèque… Et j’ai foncé sur Corniche Kennedy.
C’est le Marseille des locaux qui est retranscrit ici. Celui des gamins des quartiers Nord, dont l’avenir est coincé entre les barres HLM et les abribus tagués, celui des habitués, de ceux qui veulent juste exercer leur métier, sans doute plus par habitude, par lassitude que par vocation. C’est un Marseille un peu sale, bétonné et gris, contrastant avec celui du large, du soleil méridional et de la sensation d’infini. C’est pourtant dans celui-là qu’évoluent les gosses de ce roman. En mal de sensations fortes, ils viennent se défoncer là, sur la corniche Kennedy, fument pas mal, rigolent beaucoup, et sautent, plongent. Ils veulent se sentir vivants le temps de quelques secondes, ces secondes d’entre-deux, dans le vide, surpassant leurs peurs. C’est une bande de racailles, de petits merdeux selon les adultes, une belle brochette d’inconscients qui ne font rien de leur vie à part la risquer.
J’ai tout de suite été séduite par l’histoire et l’écriture de l’auteure. C’est une écriture très fluide, parfois très orale, qui énumère sans retenue tous les points de vue. Elle nous fait voyager, on sent l’iode, la crème solaire et le mazout, on voit les premiers couples adolescents se faire, et on sent le soleil qui chauffe la peau. C’est une ode à la liberté pour des gamins auxquels on n’interdit rien et qui pourtant sont comme condamnés à ne rien faire. Et une réflexion superbe sur le passage à l’âge adulte, ce moment où subrepticement, l’inconscience laisse la place au raisonnable et où les comportements des jeunes semblent alors devenir stupides. C’est l’histoire d’un conflit entre générations, parfois aussi entre classes sociales, magnifiquement retranscrit par l’auteur.
S’il n’y avait pas eu plusieurs grosses longueurs dans la deuxième partie du livre, j’aurais sans doute considéré ce livre comme un coup de cœur. J’ai trouvé dommage que l’histoire s’essouffle peu à peu, car le sujet était très bien traité et assez original. Cela reste malgré tout une très bonne lecture, et je conseille vivement à ceux qui aiment le contemporain de découvrir cette auteure si ce n’est pas déjà fait.
9 Comments
La Critiquante
Il est vrai que le thème du livre est original, j’ai adoré l’ambiance créée ici. Mais comme toi, je le trouve parfois un peu long.
laroussebouquine
J’ai vu que c’était le ressenti de nombreux lecteurs. C’est vraiment dommage, car le reste est absolument génial !
lydieetseslivres
Dommage pour les quelques longueurs mais j’ai l’impression que ce n’est pas ce dont tu vas te souvenir en pensant à ce livre.
Il faut vraiment que je découvre la plume de Maylis de Kerangal.
laroussebouquine
C’est tout à fait ça 🙂
Et oui je te le conseille, sa plume vaut vraiment le détour.
Carnet Parisien
Je suis contente que tu aies passé un bon moment avec l’auteur, une fois de plus, malgré le non coup de coeur ^^ comme je te l’avais dit, je n’ai pas vraiment aimé Réparer les vivants, du coup je ne pense pas être prête à renouveler l’expérience… bises !
laroussebouquine
C’est clair que si tu n’as pas aimé Réparer les Vivants, je ne te le conseille pas !
accalia
Il faut que je prenne le temps de lire ce roman -ou d’autres romans de cette auteure- merci pour cette critique, au moins je suis prévenue sur les longueurs dans la deuxième partie!
Ludo
Bon ben… Encore une fois je ne connais pas l’auteure :/
J’ai l’impression qu’on est pas sur la même planète livresque :p Mais c’est ce qui est chouette aussi !
laroussebouquine
Ca permet de faire des découvertes ! Après je sais que beaucoup de blogueurs lisent principalement du jeunesse et j’essaie de lire d’autres choses…