La Lectrice

Rencontre avec Sarah Barukh pour “Elle voulait juste marcher tout droit”

Le 24 mars, à l’occasion de Livre Paris, j’ai pu rencontrer Sarah Barukh, auteur de Elle voulait juste marcher tout droit chez Albin Michel. J’avais eu un réel coup de cœur pour son roman il y a quelques semaines maintenant et j’ai été ravie de pouvoir en discuter avec l’auteur !

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Il y a des dizaines de livres sur la Seconde Guerre Mondiale, mais finalement peu sur « l’après ». Pourquoi avoir choisi de parler de cette période ?

J’ai voulu écrire cette période car elle me fascine. Il est vrai qu’on parle beaucoup de la Seconde Guerre Mondiale encore aujourd’hui, car c’est une période de l’histoire encore très récente ; on a encore parfois des membres de notre famille vivants qui ont fait la guerre. Mais au fond, quand on parle de cette période, on parle d’un conflit de 1939 à 1945. Comme si à la fin, il y avait eu un happy end et que tout était fini ! Or ce n’est pas vrai, on ne peut pas s’en remettre comme ça, il a fallu des années aux gens pour se remettre d’un tel traumatisme. C’est pour ça que j’ai choisi de parler des années d’après-guerre, pour montrer que tout n’était pas fini et n’était pas aussi simple.

couv484829J’ai trouvé que votre livre était très documenté, du moins assez pour qu’il soit vraiment immersif. Avez-vous fait beaucoup de recherches pour l’écriture ?

Je crois que faire des recherches pour le roman est la partie que j’ai préférée ! J’aime beaucoup le côté « enquête ». J’ai regardé énormément de documentaires sur la période sur YouTube, regardé des films, ou lu pas mal de livres sur le sujet. J’ai aussi fait beaucoup de recherches sur certains personnages historiques comme Robert Capa, dont je me suis fortement inspirée pour créer le personnage de Vadim dans le roman.

Est-ce que certains détails sont quand même inspirés d’anecdotes personnelles (ou plutôt de famille) ou absolument pas ?

Evidemment ! Mes grands-parents ont connu la guerre, ils l’ont vécue, donc forcément j’ai été un peu influencée par leurs histoires. Par exemple, Alice grandit à Salies de Béarn : ce n’est pas un hasard puisque ma grand-mère y a vécu. Pour autant, elle n’a pas du tout eu l’histoire d’Alice !

J’ai adoré le fait que le roman aborde l’histoire d’un point de vue différent. Comme c’est une petite fille qui raconte, elle ne sait rien des camps de concentration ou de la Résistance. Pourquoi avoir justement choisi ce point de vue ?

J’ai choisi de raconter cette histoire du point de vue d’une petite fille car j’avais envie de créer un décalage. Dans le roman les personnages ont presque tous un point commun : ils n’arrivent pas à vivre dans le temps présent, ils vont de désillusion en désillusion. Alice en est l’exemple même : elle rêve de retrouver sa maman, mais quand elle la rencontre enfin, sa mère correspond à tout sauf au modèle qu’elle s’était imaginé. On lui dit qu’elle va vivre à Paris et que ce sera fantastique, tout comme elle va vivre le rêve américain en partant à New York, mais là encore elle déchante vite car ça n’a rien à voir avec ce qu’on lui avait promis. Avec la guerre, les adultes ont tous plus ou moins perdu quelque chose, et ils n’arrivent pas à revenir à une vie normale. Finalement, ce sont eux qui vont caler leurs pas dans ceux d’Alice pour passer à autre chose.

Pourquoi avez-vous choisi de faire voyager Alice autant, de la campagne à Paris, en passant par New York ?

Toujours pour aborder cette notion de désillusion justement ! Le roman est un peu comme une quête, Alice passe d’un lieu à un autre et va de déconvenue en déconvenue, mais elle grandit en même temps. J’ai eu besoin de la faire voyager pour lui faire vivre toutes ces aventures.

On parle souvent du travail de l’écrivain lorsqu’il s’agit de premiers romans. Pouvez-vous m’en dire plus ? Avez-vous des méthodes particulières, était-ce long à écrire, ou au contraire très instinctif ?

C’est mon premier roman publié mais en réalité j’écris depuis quinze ans, c’est juste la première fois que ça marche ! J’avoue que je n’y croyais pas trop quand j’ai su que j’allais être publiée chez Albin Michel.

Concernant le roman en lui-même, je voulais avant tout parler de l’histoire entre Alice et Vadim, et créer une quête entre roman historique et roman d’aventure. J’avais d’ailleurs écrit seulement la partie qui se déroule aux Etats-Unis, ce devait être le roman dans son ensemble. J’ai finalement rajouté toute la première partie à Salies de Béarn pour plus de cohérence, je me suis dit qu’on devait comprendre d’où venait Alice pour mieux adhérer au personnage et comprendre son histoire.

Y’a-t-il d’ailleurs un second projet en préparation ou ce n’est pas du tout au programme ?

Il y a déjà un deuxième et un troisième romans en préparation, et tout ce que je peux dire c’est qu’ils seront totalement différents !

Avez-vous participé au travail éditorial, autour de la couverture par exemple ? En êtes-vous satisfaite ?

Oui, j’y ai participé, et je suis ravie du résultat ! Pour la couverture, on m’a effectivement consultée. J’avais dit que je voulais une photo avec une petite fille sur des rails. Je crois que je ne pouvais pas être plus satisfaite !la vie devant soi

Enfin, question presque obligée, surtout au milieu du Salon du Livre de Paris ; quel est votre dernier coup de cœur / livre préféré que vous souhaiteriez recommander ?

Récemment, j’ai adoré Romain Gary s’en va en guerre de Laurent Seksik chez Flammarion, surtout parce que j’adore Romain Gary. D’ailleurs, si je ne devais parler que d’un livre, je parlerai forcément de La Vie devant Soi qui est mon livre préféré. Là aussi c’est l’histoire de gens à Paris du point de vue d’un enfant !

Merci à Sarah Barukh d’avoir pris le temps de répondre à mes questions !

4 Comments

  • Eva

    Je n’ai pas lu ce livre, mais je suis tout à fait d’accord avec l’auteure sur un point: si les livres et films sur la Deuxième Guerre Mondiale sont légion, on parle vraiment très peu de l’après, et moi aussi c’est une période qui m’intrigue : comment se remet-on de la guerre, des camps, de tous ces morts? et quel impact cela a-t-il sur la génération d’après?
    rien que pour ça, ça me donne envie de lire le roman.

    • Laroussebouquine

      Je me posais aussi ces questions ; j’ai eu la chance d’avoir eu un chapitre complet d’histoire à ce sujet en terminale, ça remet les choses en perspective.
      Et pour le livre, n’hésite plus, il est fantastique !

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