La Lectrice

Elle n’était pas d’ici – Patrick Poivre d’Arvor

Elle n’était pas d’ici ; Patrick Poivre d’Arvor

Albin Michel

1995

165 pages

Quatrième de couverture : “Puisque Solenn a choisi de mettre fin au combat qu’elle menait depuis trois ans contre les démons de sa maladie, je voudrais, comme Patrick, que sa disparition soit un signal d’alarme. J’aimerais que ce livre, écrit dans l’urgence de la douleur, soit un cri vers tous ceux et celles, adolescents ou préadolescents, qui seraient tentés par la terrible impasse du suicide. La souffrance qui se lit dans ces pages, à travers les lettres reçues, est celle, indicible, de Solenn et de milliers d’autres. C’est celle aussi des parents qui assistent, impuissants, à la destruction de leur enfant. Si cette souffrance qui a été la nôtre peut aider tous ceux qui ont été ou vont être confrontés à l’anorexie ou à la boulime, alors Solenn ne sera pas morte pour rien.” Véronique Poivre d’Arvor.

Mon avis : En ouvrant ce livre, je m’attendais à un témoignage fort et bien écrit, surtout après ma découverte des Lettres à L’absente en janvier, ou Patrick Poivre d’Arvor se confiait à sa fille Solenn, hospitalisée pendant de nombreux mois à cause de son anorexie. Dans Elle n’était pas d’ici, le ton est plus triste encore, puisque le père se confie encore une fois à sa fille par le biais de lettres, cette fois-ci après son suicide.

“Il y a deux semaines, j’ai enterré une extraterrestre. Je ne sais pas d’où elle venait. Ni où elle est repartie.”

Il revient sur ses différentes tentatives, et le jour où malheureusement, elle a réussi. La façon dont il l’a appris, dont il a essayé de l’admettre, de voir ce geste comme une preuve immense de courage, et la façon dont il a essayé d’avancer, petit à petit. Ecrire devient alors un moyen d’accepter la situation, de la rendre plus supportable, peut-être, mais aussi de rendre un dernier hommage à cette fille combative, solaire, mais aussi sans doute incomprise.

“Ecrire, ça soulage. On appuie là où ça fait mal, on se mord la lèvre, mais ensuite, on supporte la douleur. On se branche avec celle de l’autre, celle des autres, et on se libère. C’est une manière de courant alternatif qui vous passe dans les veines, avec des frémissements d’aise et de peur.”

Ce livre est très bien écrit et vous touche en plein cœur. C’est la déclaration d’un homme qui souffre, qui pleure, qui essaie de se résoudre face à un choix si brutal et tragique. Ce sont des confidences, douces-amères, un récit dans lequel on se sentirait presque un peu intrus, tant il est personnel, à l’état brut. Et touchant à souhait. Car le sujet est grave, il n’est pas tant teinté d’espoir mais plutôt de respect. De respect face à une décision qui devait être difficile tant elle est lourde de conséquences. On croyait presque que l’auteur s’excuse d’être malheureux face au choix de sa fille. Comme s’il devait être content qu’elle ait enfin trouvé la paix.

Patrick Poivre d’Arvor nous dresse une fois de plus un portrait éblouissant de sa fille, poignant. Comme dans Les Lettres à L’absente, il apporte le regard d’un proche face à des maladies (l’anorexie et la boulimie) qui sont encore aujourd’hui peu comprises. Regard souvent oublié dans les œuvres consacrées à ce sujet.

Elle n’était pas d’ici est un hommage grandiose à une disparue éclectique, que tout le monde connaissait sans connaître. Un témoignage criant d’amour et de respect qui risque de me marquer encore longtemps.

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2 Comments

  • Miss Charity

    J’ai lu les deux livres que tu évoques il y a quelques années, et en effet il s’agit de lectures marquantes et poignantes, des déclarations d’amour vibrantes d’un papa à sa fille, mais aussi des témoignages de cette souffrance qu’est l’anorexie mentale.
    Je ne sais si tu as lu “J’ai tant rêvé de toi”, un roman co-écrit par Olivier et Patrick Poivre d’Arvor, dans lequel il est question d’une jeune fille anorexique qui part à la recherche de son père. Il est bouleversant, remarquablement bien écrit. Je te le conseille si tu ne l’as pas déjà lu !

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